Église Notre-Dame-la-Riche

Localisation :

Tours, place La-Riche

Dates :

XVe siècle ; 1860

État du batiment :

Conservé

Église Notre-Dame-la-Riche.
Crédits : Photo © Ophélie Delarue

Dès le début du IVe siècle, sous saint-Lidoire, une chapelle Notre-Dame-la-Pauvre est édifiée à l’emplacement d’un ancien cimetière chrétien fondé par Gatien, premier évêque de Tours et mort en 300, où il y est inhumé [Bourassé, 1848, p.5]Dans le cartulaire de Villeloin, daté de 1156, apparaît l’appellation de Notre-Dame-la-Riche [Vicart, 1847, p.255 ; Huguet, 2012, p. 14]. Une église ne changeait de vocable que si celle-ci était reconstruite, ce qui nécessitait une nouvelle consécration [Zadora-Rio, 2008, p.51  ; Huguet, 2012, p. 15]. Ainsi, l’église du XIIe siècle succède à la chapelle primitive. Cette première église s’étendait plus à l’ouest, au niveau de l’édicule surmontant la crypte de saint Gatien au n°12 rue Georges Courteline [Jeanson, 1973, p. 276]. Des vestiges de la partie ouest de cette église – la tour nord – étaient conservés jusqu’à sa destruction totale à la fin du XVIIIe siècle. Louis de la Grandière, mort en 1788, décrit le « pilier de la Riche », une grande structure maçonnée [Huguet, 2012, p. 15]. Il s’agissait d’une tour dans laquelle étaient aménagés divers volumes voûtés. Il ajoute que « le 1er juillet 1572, dans les temps des troubles de la religion, les protestants firent démolir cette tour et trois des piliers. » [De la Grandière, 1906, p. 14-16, p. 67]. Deux tours se tenaient devant l’entrée de l’église, à l’ouest. Également, l’auteur estime que la tour est du XIe ou du XIIe siècle, ce qui correspondrait à la date de reconstruction de l’église. Ce sont les travaux de la seconde moitié du XVe siècle qui lui confèrent l’aspect général que nous lui connaissons aujourd’hui [Huguet, 2012, p. 16]. Cette période correspond à la réalisation des baies situées dans les deux premières travées méridionales du Chœur. Selon le témoignage de l’italien Francesco Florio qui visita la Touraine au XVIe siècle, l’église était ornée de fresques dont quelques-unes étaient du peintre tourangeau Jean Fouquet [Jeanson, 1973, p. 276]. Enfin, durant la Révolution française, l’église est transformée en usine de salpêtre avant d’être rendue au culte en 1798 [Huguet, 2012, p. 19]. La restauration de l’église fut confiée à l’architecte diocésain Gustave Guérin de 1860 à 1866 [Huguet, 2012, p. 20].  À l’extérieur, furent entièrement restaurés les portails sud et ouest ainsi que la façade sud, de 1991 à 1995 [Base POP, PA00098147].

Église Notre-Dame-la-Riche, détail de La fort ancienne et noble ville de Tours, Claes Jansz Visscher, 1625, gravure, Tours, Bibliothèque municipale, Ic. 2894/1-4.
Crédits : © Bibliothèque municipale de Tours, cliché F. Joly

 

L’église adopte un plan massé trapézoïdal où, dans la partie est, la Nef est accompagnée de collatéraux larges et élevés tandis que, dans la partie ouest, les collatéraux sont étroits et bas. L’église est donc dépourvue de transept et le Chevet plat est asymétrique. Ce plan rectangulaire est fréquemment utilisé dans les églises paroissiales. Tours ne déroge pas à cette règle, un bon nombre d’édifices religieux adoptent ce plan comme l’église Saint-Saturnin reconstruite au 4e quart XVe siècle ou début 1er quart XVIe siècle [Huguet, 2012, p. 54 ; Base POP, IA00071211].  

Ordre des principales interventions sur l’église Notre-Dame-la-Riche, état actuel (modifications de Claire Huguet d’après le plan dressé par Gustave Guérin avant restauration, AD 37 2061.126. Plan extrait de Huguet Claire, L’église de Notre-Dame-la-Riche, exemple d’un chantier paroissial à Tours à la fin du XVe siècle, 2 vol., mémoire de Master 2 sous la direction d’Alain Salamagne, Université de Tours, [2012], p. 7.
Crédits : Plan © Claire Huguet, Gustave Guérin, Photo, Adobe © Ophélie Delarue.

À ce jour, l’église est dotée de deux entrées: au sud, le portail principal fait face à la rue Georges Courteline, autrefois appelée la Grand-Rue qui constituait un axe majeur liant la ville de Tours au château du Plessis, et à l’ouest, sur la rue Alleron, le portail ouest largement modifié au XIXe siècle. La façade nord présentait pourtant des vestiges d’un portail, en symétrie du portail sud [Huguet, 2012, p. 46]. Un plan de Guérin le représente [AD 37, 2O261. 126]. Les restes d’une Voussure confirment sa présence. Le décor semble être toutefois davantage porté sur le portail sud que sur le portail nord, sûrement en raison de son emplacement sur la Grand-Rue. Les photographies datant d’avant l’intervention de Gustave Guérin montrent un décor foisonnant qui existait déjà avant son intervention [AD 37, 2O261. 126]. La richesse ornementale du portail s’exprime par l’ouverture d’un large arc brisé redenté dont la partie supérieure est surmontée d’un Accolade à fleurons et crochets sculptés en feuille de chou frisé profondément ciselé – qui se retrouvent sur la plupart des pignons et baies – portant une niche. La voussure, les piédroits et les contreforts ornés des pinacles qui encadrent le portail reçoivent également des niches à Dais, aujourd’hui vides. Fermé par une maçonnerie grossière en parpaings, le Tympan est à présent ouvert d’une rosace à soufflets résultant des campagnes de restaurations du XIXe siècle. 

Gustave Guérin est intervenu sur le gros-oeuvre de la façade occidentale puis Charles Guérin succède à son père pour terminer la restauration du portail entre 1887 et 1892 [Huguet, 2012, p. 22].  La façade ouest témoigne des transformations inventées par les architectes Guérin [AD 37, 6 V7 424 ; Archives du diocèse de Tours, P-3L]. Au centre, entre deux contreforts, s’ouvre un portail. Le pignon est percé d’une haute baie à remplages. Enfin, une petite rose éclaire les combles. À la rencontre du portail et de la chapelle nord, une tourelle d’escalier dessert l’ensemble des niveaux. Les transformations du XIXe siècle concernent principalement la monumentalisation du portail et le percement de niches recevant des statues dans les façades des chapelles. 

Façade ouest : Église Notre-Dame-la-Riche.
Crédits : Photo © Ophélie Delarue

Les collatéraux, de même que l’ensemble du massif oriental, conservent quelques éléments d’architecture gothique : pinacles, crochet, fleurons, remplage des baies…, etc. 

 

L’intérieur de l’église est très restauré, en particulier les voûtes de la nef réalisées en brique au XIXe siècle par Gustave Guérin [Base POP, PA00098147]. En outre, l’architecte a plaqué un faux appareil qui masque d’éventuelles traces archéologiques [Huguet, 2012, p. 31].

Vue des entraits au nord du Vaisseau central, prise de l’ouest . Photographie extraite de Huguet Claire, L’église de Notre-Dame-la-Riche, exemple d’un chantier paroissial à Tours à la fin du XVe siècle, 2 vol., mémoire de Master 2 sous la direction d’Alain Salamagne, Université de Tours, [2012], p. 47.
Crédits : Photo © Claire Huguet

Masquée par ces voûtes, la charpente de la nef et du chœur semblent avoir été épargnée par les travaux de Gustave Guérin. Il s’agit d’une charpente à chevrons-formant-fermes anciennement lambrissée, voûtée en berceau brisé. Les entraits engoulés, les poinçons taillés de manière polygonale ou encore les vestiges de lambris sont des traces archéologiques qui témoignent du parti pris de reconstruction au XVe siècle. Le soin apporté au décor démontre que la charpente aurait été apparente [Huguet, 2012, p. 36-39]. 

Engoulant du deuxième entrait en partant de l’est. Photographie extraite de Huguet Claire, L’église de Notre-Dame-la-Riche, exemple d’un chantier paroissial à Tours à la fin du XVe siècle, 2 vol., mémoire de Master 2 sous la direction d’Alain Salamagne, Université de Tours, [2012], p. 48.
Crédits : Photo © Claire Huguet

Le nom de Jehan Raschez, maître d’œuvre de l’église, apparaît en 1496 [Port, 1883, p. 104 ; Huguet, 2012, p. 56]. Il entretenait des relations avec Michel Colombe puisque ce dernier l’a choisi pour analyser le chantier Saint-Florent de Saumur. Le chœur, datant du XVe, présente de nombreuses irrégularités de voûtement et est probablement l’élément premier de l’édifice. Une nef à vaisseau unique a ensuite été adjointe. Lors des dernières années du XVe siècle ou des premières années du XVIe siècle, la charpente du vaisseau central du chœur est surélevée, la nef reconstruite et bordée de collatéraux de chaque côté [Huguet, 2012, p. 56-59].
Les clés de voûte du chœur et des bas-côtés de la nef reçoivent un décor d’armoiries dont l’essentiel a été buché. Notez les coquilles Saint-Jacques encore conservées. 

L’église Notre-Dame-la-Riche possède un ensemble hétérogène de 18 verrières datées des XVe, XVIe, XIXe et XXe siècles. Plusieurs verrières des XVe et XVIe siècles sont à signaler dans le chœur.

 

Bibliographie et source

Archives départementales d’Indre-et-Loire, 2O261. 126, Photographie du portail sud avant les restaurations de 1860-1866, non datée.
Archives départementales d’Indre-et-Loire, 2O261. 126, Plan de l’église de La Riche, échelle 1/100e, calque et aquarelle, signé Guérin, 12 juillet 1858.
Archives du diocèse de Tours, P-3L. Église Notre-Dame-la-Riche, restauration du portail et de la façade occidentale, daté de 1887.
Base POP, IA00071204 et PA00098147
Bourassé Jean-Jacque, Notice historique et archéologique sur l’église paroissiale de Notre-Dame-la-Riche à Tours, Tours, éd. Mame et Cie, 1848.
De la Grandière Louis, « Abrégé chronologique et historique de la mairie de Tours, t. I » dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, publié par Gollon G., t. XVLII, 1906.
Grandmaison Charles, «Destruction du pilier de Notre-Dame La Riche » dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, t. XIII, 1842, p.333-338.
Huguet Claire, L’église de Notre-Dame-la-Riche, exemple d’un chantier paroissial à Tours à la fin du XVe siècle, 2 vol., mémoire de Master 2 sous la direction d’Alain Salamagne, Université de Tours, [2012].
Jeanson Denis, Sites et monuments du grand Tours, Astragale, 1973.
Port Célestin, « L’opinium des maistres d’euvres de Tours » dans Réunion des sociétés savantes des départements à la Sorbonne…., 1883, septième session, p.103-105
Vicart abbé, « Mémoire présumé de la basilique dite de Saint-Lidoire, bâti par cet évêque sur le terrain de la maison d’un sénateur, vers l’an 350 » dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, t. XIII, 1847, p.182-258.
Vicart Abbé, « Mémoire sur les verrières du chœur de l’église de Notre-Dame-La-Riche de Tours », dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, Tome II, Tours, 1843, pp. 148-177.
Zadora-Rio élisabeth (dir.), Des paroisses de Touraine aux communes d’Indre-et-Loire, la formation des territoires, éd. FERACF, Tours, 2008.


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